Le handicap en milieu carcéral : pour une meilleure prise en charge des personnes en situation de handicap
‘Le handicap en milieu carcéral’, c’est la thématique traitée par la CRDH de Rabat-Kenitra dans le cadre de la rubrique ‘Une heure, une région’ au stand du CNDH (SIEL 2016). Le choix du thème n’est pas fortuit, la région abrite en effet le plus grand nombre d’établissements pénitentiaires, d’où l’intérêt portée à cette question, comme l’a souligné le président de la CRDH de Rabat-Kenitra, M. Abdelkader Azrii à l’ouverture de cette rencontre qui a été modérée par M. Abdelhak Edouk, chargé de la protection des droits de l’Homme en milieu carcéral au CNDH.
Lors de cette séance, organisée le dimanche 14 février 2016, les intervenants ont passé en revue les conditions de détention au sein des établissements pénitentiaires, notamment à la lumière des statistiques au titre de 2015 présentées par M. Mustapha Lafrakhi, directeur de l’action sociale et de la réinsertion au sein de la Direction générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion. Au Maroc, on compte aujourd’hui environ 300 détenus en situation de handicap au titre de 2015, dont 22% sont en détention provisoire et 78% ont un jugement définitif. Ce chiffre reflète-t-il réellement la réalité de la présence des personnes en situation de handicap (PESH) au sein des prisons ? Ce qui est sûr en tout cas, c’est que des études ont montré que souvent, certains handicaps ne sont pas déclarés par les personnes concernées, ce qui expliquerait ces statistiques officiels, comme l’a souligné pour sa part Mme Yana Yordanova Zdravkova, doctorante en sociologie en France.
La présence des PESH au sein des prisons pose la question de leur prise en charge, au regard des besoins spécifiques de cette catégorie. Comment doit donc se matérialiser cette prise en charge sachant que seuls 58% des établissements pénitentiaires marocaines sont dotées d’accessibilités, que 63% de ces détenus souffrent d’une déficience motrice et que 26% sont des non-voyants, ce qui pose un problème d’autonomie et entrave la jouissance par ces détenus des autres droits qui leur sont conférés par la loi.
Pour M. Abdesslam Benbrahim, membre de la CRDH de Rabat-Kenitra, la présence des PESH pose aussi la question de la qualification du personnel des prisons dont la formation doit être adaptée afin qu’il puisse accompagner ces détenus et éviter qu’ils soient doublement pénalisés, une fois par leur handicap, et une seconde par les conditions de détention.
Enfin, la question de la réinsertion des personnes en situation de handicap a été également évoquée par les participants d’autant plus que 31% de ces détenus sont sans emploi, que 86% ont un niveau scolaire ne dépassant pas le collège et que seuls 7% d’entre eux bénéficient des programmes de réinsertion sociale.
Un appel a été lancé à l’issue de cette rencontre, en vue d’une part, de mener une enquête nationale visant à identifier le nombre exact de cette population carcérale ainsi que leurs conditions de détention, et d’autre part pour réviser la loi pénitentiaire dans le sens de l’intégration du droit de compensation spécifique aux conséquences du handicap, quelle que soit la nature de la déficience.