Séminaire régional sur la peine de mort en Afrique francophone : Driss El Yazami, ‘Après le moratoire de fait, il est temps de passer à l’étape suivante, celle de l’abolition’
Les représentants de douze Institutions nationales des droits de l’Homme (INDH) de l’Afrique francophone étaient en conclave, les 4 et 5 octobre 2017 à Rabat. Ils ont répondu présent à l’appel du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) et de l’association Ensemble contre la peine de mort (ECPM) qui ont organisé un séminaire régional sur la peine de mort en Afrique francophone sur le thème ‘Les Institutions nationales des droits de l’Homme (INDH) et la peine de mort’.
Tenu en partenariat avec l’Association francophone des Commissions nationales des droits de l’Homme (AFCNDH) et le Réseau des institutions nationales africaines des droits de l’Homme (RINADH), et avec le soutien du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères et de l’Organisation internationale de la francophonie, ce séminaire a constitué une occasion pour réitérer l’importance du rôle des INDH dans le combat abolitionniste et examiner les moyens de les inciter à plaider en faveur de la lutte contre la peine de mort.
En effet, pour Driss El Yazami, président du CNDH, ce séminaire ‘a pour objectif d’enrichir le débat public et pluraliste sur l’abolition de la peine de mort et d’associer le plus grand nombre possible d’acteurs à ce débat. ‘La décision d’abolition doit être prise d’une manière démocratique’ a-t-il dit.
Un débat que les INDH sont appelés à porter au regard de leurs prérogatives et du rôle de relai qu’ils jouent auprès du gouvernement. Raphaël Chenuil-Hazan, Directeur général d’Ensemble contre la peine de mort a affirmé à cette occasion ‘qu’il est temps que les INDH s’approprient la question de l’abolition, même si c’est une question compliquée et difficile à mener dans leur société’. Pour les soutenir dans cet effort, ECPM a prévu de publier des outils et des kits sur la question spécifique de la peine de mort. ‘Les INDH ont besoin d’information en vue de les aider à porter le discours abolitionniste’ a-t-il dit.
Le congrès régional contre la peine de mort qui se tiendra à Abidjan en avril 2018 et le congrès mondial qui aura lieu en 2019 à Bruxelles sera une occasion de faire le point sur les réalisations des INDH dans ce domaine.
Au Maroc, le débat national se poursuit entre les abolitionnistes qui considèrent cette peine comme inhumaine et portant atteinte au droit à la vie et ses défenseurs qui la qualifient de dissuasive. Pour Mohamed Aujjar, ministre de la Justice ‘l’objectif est de trouver l’équilibre nécessaire entre le droit à la vie et le droit de l’Etat d’ôter cette vie au nom du droit’.
En attendant le murissement de ce débat, le Maroc maintient ses réserves sur l’abolition mais pratique un moratoire sur les exécutions depuis 1993, ce qui fait de lui un pays abolitionniste de fait. Cela démontre que pour le gouvernement ‘ce n’est pas une peine acceptable. Il est temps donc de passer à l’étape suivante, celle de l’abolition’.
Intervenant lors de la première journée du séminaire, Mohammed Essabbar, Secrétaire général du Conseil a mis en exergue des pistes d’action à même d’atteindre l’objectif ultime de l’abolition. ‘Il est nécessaire que le combat pour l’abolition s’érige en affaire sociétale et en préoccupation majeure auprès de l’opinion publique’. Pour ce faire, a-t-il poursuivi, il est nécessaire de mener des campagnes de sensibilisation et de plaidoyer auprès des différents corps de la justice (magistrats, avocats…), des médias et auprès de la Cour constitutionnelle pour établir la non constitutionnalité de cette peine. Outre l’ancrage des principes des droits de l’Homme dans les curricula, Mohammed Essabbar appelle aussi à élargir le mouvement des abolitionnistes au sein de l’institution législative.
Les travaux de ce séminaire se sont déroulés sous forme de sessions et de panels ayant abordé deux grandes thématiques : l’état des lieux de la situation de la peine de mort dans le monde, notamment en Afrique et les moyens d’action des INDH vers l’abolition de la peine de mort. Il a pris fin par l’adoption d’une déclaration finale.